Signez la lettre ouverte du mouvement #OpenDnD

21:13 Vincent L. 0 Comments

 ⚠️ Disclaimer

Avec l'accord des fondateurs du mouvement #OpenDnD, nous traduisons et reproduisons ici le contenu du site opendnd.games. Comme nous l'avons exprimé dans notre lettre ouverte, nous soutenons ce mouvement. Nous appelons l'ensemble de la communauté francophone à se mobiliser en signant la lettre ouverte adressée à WOTC dont vous trouverez la reproduction ci-dessous.  
 
Depuis la mise en ligne début janvier, plus de 60.000 personnes ont signé la pétition, forçant WOTC à faire certaines concessions et revenir sur certains aspects problématiques de la licence 2.0.

Pour autant, le combat continue.
 
Le contenu ci dessous correspond au contenu original du site opendnd.games tel qu'il a été publié en début janvier. Ses auteurs mettent à jour le contenu selon l'évolution de la situation. Rendez-vous sur leur site pour lire en anglais la version la plus à jour. 
 
Enfin, nous vous demandons de la retenue, du respect et de la bienveillance vis-à-vis des équipes de WOTC, en particulier les équipes créatives. Les évolutions de l'OGL ne relèvent pas de leur responsabilité mais sont issues des choix de la direction et des actionnaires d'Hasbro.

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SOMMAIRE

Wizards of the Coast veut démanteler l’industrie du jeu de rôle
La Lettre ouverte du mouvement #OpenDnD
Signez la lettre ouverte
FAQ #OpenDnD
Le révisionnisme à la Wizards
Confiance et trahison, une rétrospective de l’OGL 
 
#OpenDND logo by Matthew of Abyssal Brews
 
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Wizards of the Coast veut démanteler l’industrie du jeu de rôle

Nous avons besoin de votre aide pour l’en empêcher.

Qu’est-ce que #OpenDnD ?

Une lettre ouverte à Wizards of the Coast au sujet de l’Open Gaming License.
 

Lettre ouverte du mouvement #OpenDnD

Qu’est-ce que l’Open Gaming License ?

L’Open Gaming License (OGL) [Licence de Jeu Libre] est une infrastructure légale qui permet à des créateurs d’utiliser les règles et concepts de certains jeux de rôle pour leurs propres œuvres. Initialement publiée en 2000 par Wizards of the Coast, l’OGL est devenue un pilier de l’industrie du jeu de rôle. Elle a alimenté la popularité et l’accessibilité de jeux tels que Pathfinder, 13e Âge ou Donjons & Dragons 5e Édition. Rien n’a autant nourri la créativité et l’innovation au sein de l’écosystème du jeu de rôle que l’OGL. En permettant à des créateurs d’exploiter et d’enrichir collectivement le système de base et les concepts fondamentaux de jeux existants, l’OGL a engendré une large variété de nouveaux jeux et créations dérivées, allant de petites productions indépendantes à de grandes gammes à succès.

La fin d’une ère libre

Or, Wizards of the Coast (WotC) a annoncé une mise à jour de l’OGL (version 1.1) en une tentative de démanteler l’entièreté de l’industrie du jeu de rôle. Cette nouvelle licence prétend révoquer complètement l’ancienne OGL, alors même que cette licence à perpétuité avait été conçue par WotC pour être irrévocable.

Cette nouvelle licence n’a rien de libre. Elle réprime la communauté foisonnante qui s’est épanouie sous la licence d’origine. Elle contraint les créateurs, qui qu’ils soient, à adhérer à un nouveau contrat qui restreint leurs possibilités, les oblige à rendre compte de leurs projets et de leurs revenus à Wizards of the Coast, et donne à WotC le droit de reproduire et de revendre leurs créations sans permission ni compensation. Cette nouvelle licence peut également être modifiée de façon encore plus défavorable ou supprimée à tout instant sans aucune indemnité.

Quant aux créateurs les plus importants du milieu, WotC leur impose une taxe ahurissante de 25 %, appliquée à tout revenu (et non tout bénéfice) au-delà de 750 000 $. Il s’agit d’une initiative anti-compétitive et monopoliste ayant pour but d’écraser les petites entreprises qui, ensemble, emploient des centaines de concepteurs, auteurs et artistes. Avec cette taxe en vigueur, plus moyen pour ces créatifs de commercialiser leurs ouvrages en boutique ou d’organiser des financements participatifs d’ampleur. Quand bien même cette taxe n’affecte que certaines sociétés du milieu, ces sociétés restent insignifiantes comparées à Wizards of the Coast, qui a engrangé 1,3 milliards de dollars en 2021.

De plus, des gammes tels que Pathfinder 1re et 2e Édition, 13e Âge, Fudge ou Traveller, tous conçus sur la base de l’OGL 1.0, devront soit annuler leurs sorties futures, soit céder 25 % de leurs revenus à WotC pour se conformer à la nouvelle licence.

Enfin, cette nouvelle licence est incompatible avec les logiciels de jeu de rôle en ligne. Il ne sera plus possible d’y héberger des systèmes OGL, et les créatifs ne pourront plus mettre leurs modules et aventures à disposition sur des plates-formes numériques telles que Foundry, Alchemy ou Shard.

Si cette nouvelle licence est majoritairement acceptée, le paysage du jeu de rôle se fracturera et perdra ses moyens d’accessibilité les plus importants, forçant les petites boîtes qui remplissent vos conventions locales à cesser leur travail et mettre la clé sous la porte. L’innovation dans l’industrie du jeu s’évaporera ; vos jeux préférés resteront prisonniers du passé au lieu de pouvoir se transposer sur votre téléphone, en réalité virtuelle et au-delà. Les projets de petits créatifs isolés perdant tout moyen de s’épanouir, la diversité de l’industrie s’étiolera.

Nous nous attendons à ce que Wizards of the Coast mette en place des poursuites onéreuses et illégales afin de forcer l’adhésion à ce nouvel accord. Même s’il perd ces procès, il aura causé des dommages irréparables à l’industrie du jeu de rôle.

#OpenDnD

#OpenDnD [#DnDLibre] est un cri de ralliement derrière lequel créateurs et fans se sont rassemblés pour exiger que WotC révoque son OGL 1.1 draconienne et s’engage à ce que toute édition future de ses jeux respecte l’OGL 1.0 existante. Il ne s’agit pas là de discuter d’une nouvelle licence retouchée, mais d’en revenir aux valeurs du jeu libre. Notre communauté mérite un futur libre si nous voulons que nos jeux préférés non seulement survivent, mais s’épanouissent !!

Si vous êtes un créatif, ne signez pas le nouvel accord. Si vous aimez le jeu de rôle, faites savoir à WotC qu’ils ne recevront aucun soutien en l’absence d’un #OpenDnD !

WotC a montré qu’il est le dragon niché sur son trésor, prêt à brûler un village prospère pour juste quelques pièces d’or de plus. Il est temps pour nous aventuriers de nous rassembler afin de défendre notre village de cette terrible créature.
 

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FAQ #OpenDnD

Les changements que Wizards of the Coast (WotC) menace d’imposer à l’Open Gaming License [Licence de Jeu Libre] ont suscité beaucoup de questions de la part des créateurs comme des joueurs. Cette page devrait clarifier certains points au sujet desquels Wizards préférerait vous voir rester dans le brouillard.

Questions des fans


Qu’est-ce que l’Open Gaming License (OGL) ?
L’OGL est une infrastructure légale qui permet à chacun d’approfondir et d’adapter des jeux de rôle existants afin de concevoir ses propres créations. Pour en apprendre plus sur l’OGL, cliquez ici.

Qui est affecté par la nouvelle OGL ?
La nouvelle OGL de WotC a le potentiel de décimer l’industrie du jeu de rôle.
• La nouvelle OGL invalide tout logiciel de jeu de rôle en ligne, laissant les créatifs dans l’impossibilité d’y apporter du contenu.
• Elle révoque la précédente OGL, et avec elle l’assise légale de jeux tels que 13e Âge ou Pathfinder.
• Elle impose une taxe si élevée que les financements participatifs d’ampleur et la commercialisation en boutique en deviennent impossibles.

Ces changements feront perdre leur emploi à des milliers de concepteurs de jeu et vous priveront du contenu que vous aimez.

La nouvelle OGL n’interdit-elle pas les NFT ?
La nouvelle OGL vous empêche vous de créer des NFT liés à D&D. Wizards of the Coast peut en minter autant qu’il le souhaite. Que puis-je faire pour l’empêcher ? Faites savoir à Wizards of the Coast que vous voulez un #OpenDnD et rien d’autre ! Dites à vos créatifs préférés de militer pour un futur libre.

Questions des créateurs


Que se passe-t-il si je signe l’OGL 1.1 ?
La licence comprend ce que l’on appelle une clause « pilule empoisonnée ». Si vous la signez pour quelque raison que ce soit, vous renoncez pour toujours à votre droit d’utiliser l’OGL 1.0 existante et de diffuser votre contenu librement. Ce sera le cas même si WotC ne parvient pas à détruire l’OGL 1.0.

Si je signe l’OGL, qui possède mon contenu ?
Légalement, vous en êtes propriétaire, mais la licence accorde explicitement à WotC la permission d’en user, y compris commercialement, pour toujours, et sans avoir à vous demander l’autorisation. Il ne vous sera plus jamais possible de retirer à WotC le contrôle de votre contenu.

Ne puis-je pas juste utiliser l’ancienne OGL ?
La nouvelle OGL révoque l’OGL 1.0 antérieure, et avec elle l’assise légale de jeux tels que 13e Âge ou Pathfinder. Telle que s’applique la licence, elle permettra à WotC de forcer les éditeurs les plus populaires du milieu à cesser leurs activités.

Puis-je toujours concevoir des œuvres similaires à D&D ?
La nouvelle OGL interdit essentiellement toute forme d’expression artistique associée à Donjons & Dragons, quand bien même celle-ci ne porterait pas atteinte à la marque déposée. Sont interdits les figurines, romans, t-shirts, autocollants, pin’s, chansons et danses.

Que puis-je faire pour empêcher ça ?
En premier lieu, ne signez pas la nouvelle OGL sur DnDBeyond.com. Dites à vos fans et à vos confrères qu’il nous faut un #OpenDnD [#DnDLibre] si nous voulons continuer à exercer notre passion !

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Le révisionnisme à la Wizards


Wizards of the Coast a annoncé une mise à jour 1.1 de l’Open Gaming License [Licence de Jeu Libre], avec pour intention de rétracter l’OGL 1.0a actuellement en vigueur qui permet à d’innombrables créations de jeu de rôle d’exister. Ce faisant, WotC s’est piqué de révisionnisme historique, prétendant réduire les 20 dernières années de jeu libre à une simple erreur de la part de la communauté, que leur nouvelle licence cherche à corriger. Voyons donc quelles intentions revendiquait Wizards of the Coast lui-même dans son OGL 1.0a en 2004.
par Mike Holik, Mage Hand Press

Restrictions Révisionnistes

Dans un post de blog récent sur D&D Beyond, WotC a fait part de son intention de publier une OGL mise à jour (que nous appellerons à partir de maintenant la Licence Restrictive), et a cherché à minimiser les ramifications de cette mise à jour, affirmant :

Cela affectera-t-il le contenu et les services D&D dont les joueurs font actuellement usage ? Normalement, non. Les logiciels de jeu de rôle en ligne les plus importants ont déjà des accords personnalisés avec Wizards les autorisant à faire ce qu’ils font. Les produits dérivés D&D tels que les figurines et romans n’ont jamais eu pour vocation d’être couverts par l’OGL, et l’OGL 1.1 n’y changera rien. Tout créatif souhaitant faire usage de D&D dans le cadre de ces formes d’expression nécessitera, comme toujours, un accord personnalisé avec nous.
Post sur le blog D&D Beyond

WotC voudrait vous faire croire que la communauté rôliste s’est toujours trompée en partant du principe qu’elle pouvait s’appuyer sur l’OGL pour concevoir des logiciels de jeu de rôle en ligne tels que Foundry, Alchemy ou Shard, ainsi que des produits tels que des figurines, des illustrations et des jeux sur ordinateur. C’est d’ailleurs ce que leur nouvelle licence appuie, restreignant drastiquement quel type de contenu il est possible de créer. La Licence Restrictive ne s’applique qu’aux produits Donjons & Dragons imprimés ou publiés sous la forme de PDF non-interactifs (ou autres formats similaires).

Pour être clair, l’Application Commerciale de l’OGL ne permet la création que de jeux de rôle et suppléments associés sous la forme de produits imprimés et de formats de fichier numérique non-interactif. Elle ne permet pas de créer quoi que ce soit d’autre, y compris des vidéos, des campagnes de jeu de rôle en ligne virtuelles ou assistées par logiciel, des jeux pour ordinateur, des romans, des applis, des romans graphiques, des musiques, des chansons, des danses ou des gestuelles (liste non-exhaustive). Vous pouvez vous adonner à ces activités uniquement dans la mesure permise par la Wizards of the Coast Fan Content Policy [politique liée au contenu conçu par des fans de Wizards of the Coast] ou par un accord spécifiquement conclu entre Vous et Nous.
Application Commerciale de l’OGL 1.1

Depuis près de 20 ans, l’étendue des libertés permises par l’OGL a nourri une culture d’innovation et d’entreprenariat dans le milieu du jeu de rôle. Il suffit de voir n’importe quelle convention ludique pour le constater : les stands proposent des figurines, des pin’, des autocollants, des t-shirts à thématique D&D ironique, des œuvres de fiction et autres jeux de rôle indépendants basés sur l’OGL vingtenaire. Et à côté de ces stands, on en trouve d’autres proposant des logiciels de pointe ayant pour but de propulser le jeu de rôle dans une nouvelle génération en usant de réalité virtuelle, de réalité augmentée ou de tables virtuelles. Tout ça n’est-il qu’un accident ?

L’OGL 1.0a d’origine a été retirée du site officiel de WotC, de même que l’article FAQ associé, posté à l’origine en 2004. Heureusement, grâce à des sites d’archives, nous pouvons revoir le passé et discerner quel était l’usage voulu par les concepteurs de l’Open Gaming License.

Question : L’Open Game Content [Contenu de Jeu Libre, associé à l’OGL] se limite-t-il au système de jeu ?

Réponse : Non. La définition de l’Open Game Content couvre également « tout contenu additionnel clairement identifié en tant qu’Open Game Content ». Vous pouvez utiliser l’Open Game License pour tout contenu que vous souhaitez publier en accord avec les termes de la Licence, y compris des œuvres de fiction, des illustrations, des cartes, des logiciels pour ordinateur, etc.
FAQ de l’Open Game License

L’OGL originale permet sans équivoque aux créateurs de raconter des histoires passionnantes par le biais de leur choix. Elle embrasse le marché libre des idées et a constitué le terreau d’une communauté avide d’innovation dans ses contenus. Le seul objectif de la nouvelle OGL de WotC semble être d’écraser cette culture et l’industrie dans son ensemble.

La mise à jour illégale

Ceux familiers de l’Open Gaming License originale pourront être perplexes face à l’idée d’une OGL « mise à jour » (et se souviendront peut-être vaguement que le plus gros concurrent de D&D a fait usage de cette licence sans aucun problème judiciaire). Analysons ce que l’OGL et la Licence Restrictive ont à dire quant à la possibilité de supprimer le jeu libre.

L’OGL 1.0a offre des termes tout simplement princiers à qui en fait usage, ceux-ci étant :
4. Permission et Adhésion : En retour de l’adhésion à cette Licence, les Contributeurs Vous accordent une licence à perpétuité, globale, libre de droits et non-exclusive, selon les termes exacts de cette Licence d’Utilisation, de l’Open Game Content.
OGL 1.0(a)

Les termes sont les suivants : « à perpétuité » signifie pour toujours ; « libre de droits » signifie que le créateur n’a pas à payer WotC pour l’utilisation de ce contenu ; « non-exclusive » signifie que ce contenu peut être utilisé par d’autres sociétés et systèmes de jeu. C’est en accord avec ces termes que Pathfinder (le plus gros concurrent de Donjons & Dragons) emploie l’Open Game License. Il semble donc raisonnable de supposer que si WotC avait simplement pu mettre en défaut ses rivaux les plus importants (ainsi que les dizaines d’autres systèmes de jeu qui utilisent l’OGL 1.0a à la lettre), il l’aurait fait il y a dix ans.

Or, la FAQ de l’Open License de 2004 affirme là aussi clairement que révoquer cette licence n’est ni voulu, ni possible :

Question : Wizards of the Coast n’a-t-il pas la possibilité de changer la Licence d’une façon qui me déplairait ?

Réponse : En effet, il pourrait. Cependant, la Licence définit déjà ce qui adviendrait alors de tout contenu précédemment publié utilisant une version antérieure (cf. Section 9). De la sorte, même si Wizards appliquait un changement que vous réprouviez, vous pourriez continuer à utiliser une version antérieure valide de votre choix. En d’autres termes, il n’y a pas de raison pour que Wizards vienne à appliquer un changement que la communauté d’individus utilisant l’Open Gaming License réprouverait, car la communauté ne ferait qu’ignorer ce changement.
FAQ de l’Open Game License

Le terme « à perpétuité » utilisé pour décrire cette licence n’était pas de l’esbroufe : elle a pour vocation de constituer une fondation inébranlable pour tout jeu basé dessus, et ce pour toujours. Si WotC publie une nouvelle licence, l’ancienne indique explicitement que vous pouvez utiliser la version de votre choix.

Or, la nouvelle Licence Restrictive commence pourtant en ces termes :

Cet accord, de même que les termes de l’Application Non-Commerciale de l’OGL, constituent une mise à jour de l’OGL 1.0(a) précédemment disponible, laquelle ne constitue plus un accord de licence valide. 
Application Commerciale de l’OGL 1.1 (et Application Non-Commerciale de l’OGL 1.1)

Il y a clairement un fossé entre le Wizards of the Coast de 2004 et celui de 2023. Quant à savoir lequel a raison, cela devra au bout du compte se régler devant les tribunaux, où le conglomérat Hasbro pourra user de son immense fortune pour faire constamment pencher la balance en sa faveur. De l’avis de l’auteur, la Licence Révisionniste de WotC est répréhensible, si ce n’est tout simplement illégale. Enfin, notre meilleur moyen de résister est de faire front en public, en exigeant que WotC nous donne un #OpenDnD maintenant et pour toujours.

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Confiance et trahison, une rétrospective de l’OGL

Wizards of the Coast (WotC) cherche à mettre à jour l’Open Gaming License [Licence de Jeu Libre] pour prendre le contrôle des créateurs tiers, ce qui fragmentera et spoliera la petite industrie de créateurs tiers (ci-après nommés « Créateurs »), ainsi que la communauté qu’ils servent. Cet article fait la rétrospective de l’Open License (ou OGL 1.0(a)), et vise à démentir les raisons avancées par WotC pour justifier les changements qui y sont apportés dans la Licence Restrictive (ou « OGL » 1.1).
par Max Wartelle, Plane Shift Press

Pourquoi l’OGL ?

Pour comprendre pourquoi Wizards of the Coast a initialement conçu une Open Gaming License, il sera bon d’aller voir du côté de l’interview de Ryan Dancey en 2002, que je vous recommande vivement de lire.

Inspiré par les projets de codage « open source » et l’essor de Linux, Ryan Dancey, alors vice-président des jeux de rôle chez WotC, propose de concevoir une version « abstraite » des essentiels ludiques de D&D 

L’idée est d’abstraire le « jeu » au sein de Donjons & Dragons et de le réduire à un ensemble de règles et de concepts décontextualisé. Il n’y a plus ensuite qu’à ajouter une bonne couche d’éléments de fantasy de style D&D, comme les classes, races, sorts et monstres typiques de D&D.
Ryan Dancey, 2002

Tout cela serait à disposition selon un accord de « copyleft » ; l’inverse du copyright.

Un « copyright » consiste à restreindre les droits d’utilisation d’une œuvre par autrui. Un « copyleft » consiste à forcer tout le monde à permettre à qui que ce soit d’utiliser une œuvre à peu près comme il l’entend, sans que ces droits puissent être restreints.
Ryan Dancey, 2002

La création de cette OGL n’était pas altruiste. Elle était sous-tendue par une stratégie commerciale solide qui verrait le moteur de jeu de WotC, le système d20, devenir le système de jeu de rôle le plus populaire de l’industrie, ce qui en retour dynamiserait les ventes de leurs livres de base, sur lesquels d’autres livres s’appuyaient.

Les ventes et les bénéfices engrangés par nos livres de base sont supérieurs à ceux de tout autre article de nos gammes. En un sens, tout autre produit autre que les livres de base que nous vendons participe à un gigantesque programme commercial qui se finance lui-même et stimule les ventes de ces livres de base. En allant plus loin encore, on pourrait dire que l’>ouvrage< phare qu’est le Manuel des Joueurs est au centre de toute cette activité. Et de fait, le Manuel des Joueurs est le n°1 des ventes et le produit de JdR le plus profitable commercialisé par Wizards of the Coast chaque année sans faute.

La conclusion logique est que réduire à zéro le « coût » que payerait autrui pour publier et soutenir le cœur de gamme de D&D devrait finir par réduire le soutien apporté aux autres systèmes de jeu au niveau le plus bas possible du marché, rendre la clientèle réticente à l’introduction de nouveaux systèmes, et le résultat de tout ce « soutien » redirigé vers le jeu D&D sera d’augmenter constamment le nombre de gens qui jouent à D&D, stimulant ainsi la vente des livres de base. C’est un cercle vertueux : plus il y a de soutien, plus il y a de gens qui jouent à D&D. Et plus il y a de gens qui jouent à D&D, plus il y a de soutien.
Ryan Dancey, 2002

Sous un regard moderne, cette stratégie semble simplement prophétique. Ces 20 dernières années, le marché tiers a foisonné sous l’Open Gaming License, poussant d’abord joueurs et créateurs à adopter le système d20, puis les poussant ensuite vers le système de D&D 5e Édition après une tentative désastreuse d’abandonner le jeu libre avec la 4e Édition. En 2002, Dancey a présenté ouvertement une stratégie de cercle vertueux, et l’histoire a prouvé qu’elle était efficace au point de devenir la clé de voûte de l’ensemble de l’industrie.

Le cœur de cette idée était qu’autant de créateurs que possible adoptent les concepts fondamentaux de D&D, notamment les sorts, objets, monstres et classes les plus classiques, lesquels seraient rassemblés dans un document nommé le System Reference Document (ou « SRD ») [Document de Référence du Système].

L’idée est de publier un document de référence du système D20 sous l’Open Gaming License, afin de mettre les mécaniques de jeu, classes, races, sorts et monstres standards de D&D à disposition de la communauté de l’Open Gaming. N’importe qui pourrait utiliser ces éléments pour concevoir un produit utilisant ces composantes sans réelles restrictions, notamment sans avoir à payer de droits ou de frais à Wizards of the Coast.
Ryan Dancey, 2002

Trahison

L’OGL étant garantie à perpétuité, il ne fut pas surprenant que des créateurs se missent à l’adopter. WotC avait dépouillé le SRD de toute propriété intellectuelle protégée. Pas de tyrannœils ou de flagelleurs mentaux, et les sorts tels que la « flèche acide de Melf » étaient renommés en « flèche acide ». Les créateurs marchèrent sur des œufs pour éviter toute propriété intellectuelle protégée, se tenant à distance de cadres tels que les Royaumes Oubliés et esquivant les références au Manuel des Joueurs et autres ouvrages. Et bien sûr, pas question d’utiliser les mots « Donjons et Dragons ».

Du fait de ces restrictions de marque déposée, les créateurs ne devaient pas donner l’impression d’être associés à D&D, mais pouvaient exploiter le système sur lequel tournait D&D. Ce système n’est pas une propriété intellectuelle protégée ! C’est du Linux. C’est une idée open source qui, nous a-t-on dit, serait libre pour toujours.

WotC a fait de gros efforts pour nourrir la confiance en cette OGL, afin que créateurs et joueurs l’adoptent comme système de jeu de base, accroissant ainsi les ventes des livres de base au profit de WotC. Dans une FAQ de 2001 au sujet de l’OGL alors fraîchement publiée, WotC fit tout son possible pour rassurer les créateurs :

Question : Wizards of the Coast n’a-t-il pas la possibilité de changer la Licence d’une façon qui me déplairait ?

Réponse : En effet, il pourrait. Cependant, la Licence définit déjà ce qui adviendrait alors de tout contenu précédemment publié utilisant une version antérieure (cf. Section 9). De la sorte, même si Wizards appliquait un changement que vous réprouviez, vous pourriez continuer à utiliser une version antérieure valide de votre choix. En d’autres termes, il n’y a pas de raison pour que Wizards vienne à appliquer un changement que la communauté d’individus utilisant l’Open Gaming License réprouverait, car la communauté ne ferait qu’ignorer ce changement.
Wizards of the Coast, 2001

Ainsi encouragèrent-ils les créateurs à utiliser cette licence.

Lorsqu’il publia la 5e Édition en 2016, WotC était bien conscient de l’existence des logiciels de jeu de rôle en ligne et de celle de ses plus gros concurrents, comme Paizo. Cela rentrait dans ses intentions. Toute affirmation comme quoi l’OGL n’a plus lieu d’être parce qu’elle « soutient la concurrence » ou « remonte à une époque où les logiciels de jeu de rôle en ligne n’existaient pas » est absolument fallacieuse. La communauté tierce est ce qui a fait de la 5e le géant qu’elle est.

Après avoir engendré cette industrie prospère de créateurs tiers, WotC veut maintenant récupérer ses jouets. Il a décidé que la mise à disposition d’un système de jeu libre et gratuit lui est dommageable, et veut le retirer. Voici ce que dit la Licence Restreinte :

Cet accord, de même que les termes de l’Application Commerciale de l’OGL, constituent une mise à jour de l’OGL 1.0(a) précédemment disponible, laquelle ne constitue plus un accord de licence valide.
Wizards of the Coast, 2022

Est-il légitime d’encourager les gens à créer dans le cadre d’un système pour ensuite leur retirer le pain de la bouche ? Est-ce une escroquerie ?

D’après ce que nous avons vu, l’OGL 1.1 n’est pas une licence libre. C’est une licence restreinte. WotC peut la modifier à tout moment pour imposer des termes encore plus contraignants. Il peut la retirer à qui que ce soit selon son bon vouloir. C’est une blague. C’est une trahison.

Note au sujet des sources

La plupart des informations présentées ici sont issues de sources qui ont été supprimées du site officiel de WotC. Nous avons pu accéder à ces sources en utilisant des archives d’Internet telles que la Wayback Machine. Dans tous les cas, nous nous sommes référés aux archives les plus récentes possibles de ces sites.